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Sur la route de Compostelle - Charente / Pays Basque à pied (2021) - 7ème étape : Villenave-d'Ornon - Cadaujac / Langon (11 km)

A Bordeaux, nous nous sommes accordés une grande matinée pour souffler. Nous n'avions pas décidé de nous mettre en route, sur cette journée en dehors du chemin, tant qu'il n'était pas 12 h. Mais une fois l'après-midi venue, nous avons tenté de colmater les brèches de cette première partie de périple, entre Charente et Gironde. Traduction, il fallait faire un peu de shopping. Pour cela, nous avons utilisé beaucoup de moyens de transport, avec un pass à la journée.

Comme Bordeaux est une vraie étape sur la route de Compostelle, nous avons fait valider notre créanciale à l'office de tourisme. Ca, c'était plutôt simple. Déjeuner à Bordeaux, c'est aussi plutôt simple, nous n'avons jamais eu un tel choix depuis le départ ! Alors que j'avais repéré un restaurant, Karima a opté pour le restaurant mitoyen "Bol de Riz" et à l'intérieur, le grand silence était revenu ! L'ambiance était plutôt confidentielle, malgré deux espagnoles (nous sommes dans le sud-ouest) et le repas nous a laissé un peu sur notre faim. Ensuite, nous avons recherché un magasin spécialisé dans la randonnée pour acheter des sacs plus convenables à notre effort et pour trouver aussi des sandales de randonnée, très utiles lorsque vous souhaitez marcher ailleurs que sur le chemin : par exemple, le matin ou le soir pour acheter à manger, ou de manière confortable dans un gîte ou une chambre d'hôtes. Déçus par certains de nos achats précédents, nous avons opté pour Foulées Bordeaux, où nous avons été bien accueillis. Mais nous ne sommes pas repartis les mains remplies. Avec nos pieds douloureux, et sans les sacs, il n'était pas facile de marcher ce jour-là. Au sortir du magasin, et à la recherche d'une nouvelle pharmacie (ce ne sera pas la dernière !), je me demande comment je vais rallier le Béarn au vu de mon état du jour, et des difficultés de récupération... Nous nous rapprochons du centre-ville et trois cents cinquante mètres plus loin, nous nous arrêtons à la première pharmacie que nous trouvons. Nous ne savons pas alors que nous allons en sortir une bonne heure plus tard !


Il y a foule rue Sainte-Catherine à Bordeaux
8 octobre 2021

Il n'y a qu'un seul client pourtant au comptoir, mais également une seule pharmacienne : Fanny. Le client est âgé et un habitué des lieux. Son sac cabas se remplit peu à peu de médicaments, jusqu'à ce qu'ils soient visibles. En quelques minutes, nous nous retrouvons de nouveau sur le chemin, hors de cette grande ville, hors du temps. Comme certains jours précédents, je suis inquiet du temps qui passe. Nous soigner est une priorité mais nous avons l'optique de changer nos sacs à dos depuis que ma bride a lâché prise sur la route de Mirambeau. Certes, il serait possible de la recoudre par des doigts de fée (Karima a tout d'abord pensé à trouver une personne qui en serait capable sur le chemin) mais je me suis dit que le sac ne serait pas solide et risquerait de subir d'autres avaries sur des centaines de kilomètres. De plus, il nous a aussi occasionné des hématomes aux épaules. Une bonne demie-heure d'attente, mais finalement pas désagréable, et le comptoir est à nous. Nous avons besoin de pansements pour lutter contre les ampoules ou les plaies qui sont résultantes, mais aussi de talc pour absorber la transpiration (merci à Maïté qui nous y a fait penser la veille), et d'une genouillère pour apaiser ma rotule droite douloureuse depuis les vignes charentaises. Finalement, nous comprenons pourquoi Fanny est allée déposer tout un sac cabas devant le domicile du client précédent. Une autre cliente entre, je me dis alors que la conversation va s'accélérer et que nous allons bientôt sortir de la pharmacie. Mais cette autre cliente est compréhensive surtout lorsque nous lui apprenons que nous sommes sur la route de Compostelle... Alors le temps ne défile pas plus vite. Finalement, Fanny nous demande de prier pour elle sur le chemin, et nous remet dans les mains de Dieu ! La spiritualité n'avait donc pas fui la grande ville girondine.

En sortant de cette pharmacie, et alors que l'après-midi est bien avancée, nous hésitons. Faut-il prendre la direction de Mérignac, pour aller dans un magasin de sports spécialisé (il nous a été conseillé chez Foulées Bordeaux), mais sans garantir de trouver le sac en question ? Ou nous rendons-nous dans la rue Sainte-Catherine, la fameuse rue commerçante de Bordeaux, pour aller à Go Sport ? Nous optons pour la deuxième solution. Nous rentrons tout juste dans le magasin et le vendeur n'a même pas à nous convaincre, qu'en dix minutes nous avons fait affaire. Nous essayons les sacs à dos Millet, et je l'adopte immédiatement après avoir attaché les brides. Il est beaucoup plus confortable ! Soulagés par notre trouvaille de la journée, et alors que le soleil disparaît peu à peu, nous nous rendons à Sports Aventure, en quête de sandales de randonnée. Je trouve mon bonheur là-bas, mais Karima est arrivée trop tard : une paire de sandales à sa taille s'est vendue peu de temps auparavant. Il faudra encore souffrir ! Nous rentrons à l'hôtel et, au moment de retourner au Mac Donald's "vintage", je retrouve le sourire : je profite de mes dernières heures sans le sac à dos et mes pieds sont soulagés dans les nouvelles sandales. Plus de douleurs ! Je peux alors marcher normalement et je nargue alors un peu mon épouse.

Le lendemain matin, après deux nuits à l'hôtel, il nous faut partir. J'ai essayé de rechercher des hébergements potentiels sur cette transition entre les voies de Tours (GR 655) et de Vézelay (GR 654) mais je n'ai rien repéré de convaincant. J'ai appelé un gérant de chambre d'hôtes qui serait bien placé pour aller à Bazas, même s'il nous faut sortir du chemin prévu en allant vers le sud-est, mais celui-ci est complet pour le soir même. Il ne reste plus qu'un séjour possible sous tente dans un HomeCamper (une application pour smartphone) mais je ne suis pas rassuré par le fait que le taux de réponses est de 31 %. Confiante, Karima me dit qu'il y a la tente et que nous pourrons toujours dormir dedans.

La veille, au petit-déjeuner à l'hôtel, nous avons plutôt subi le protocole Covid. Des chaînes métalliques rouge et blanc façon chantier et une réceptionniste un peu rude nous y attendaient. Ce samedi matin, une jeune fille avait pris la place, et le protocole exigeant du vendredi était semble-t-il parti en week-end. Devant cet accueil plus courtois, nous avons laissé à cette jeune demoiselle nos anciens sacs à dos. Un peu embarrassée, elle a finalement accepté ! Nous étions sûrs que ces deux sacs pourraient avoir une deuxième vie plus utile que sur Compostelle, pour lesquels ils ne sont pas faits. Nantis de notre nouvelle monture, nous nous mettons donc en route pour... Cadillac, à vingt-neuf kilomètres du départ, ou à proximité pour rejoindre Bazas et la voie de Vézelay le lendemain. Je sais que nous allons longer la D 1113 au départ, dans un contexte plutôt urbain, mais que nous allons en sortir progressivement. Nous sommes partis assez tôt et nous avons pris notre ravitaillement mais au bout de quelques hectomètres, nous nous rendons compte chacun de notre côté que nos corps ne répondent pas bien. L'étape ressemble à celle de Saint-André-de-Cubzac, l'hébergement du soir en moins, et alors que nous sommes régulièrement dépassés par les voitures, le coeur n'y est pas vraiment sur cette route sans âme et qui n'a pas été tracée pour qu'on l'emprunte à pied.


Du repos pour les pieds meurtris
Cadaujac - 9 octobre 2021

Après seulement une heure et demie de marche et cinq petits kilomètres en direction du sud, nous tournons à gauche et sortons de la D 1113 pour nous rendre à la gare de Cadaujac. Intérieurement, je suis déçu et un peu tendu. J'ai l'impression que notre chemin se transforme en une succession d'arrêts forcés et de passages à la pharmacie. Surtout, nous peinons vraiment à récupérer. Je m'étais dit que l'étape de Bordeaux, deux jours plus tôt, avait montré des signes de regain de forme mais à Cadaujac, tout ceci avait disparu. Nous recherchons la gare quelque temps mais en moi, l'étape est brisée. Le sens du chemin commence à se fissurer. Sommes-nous capables de poursuivre cette aventure ? J'en doute. Je ne comprends pas pourquoi nos pieds n'arrivent pas à se réparer seuls en plus des soins prodigués. Il me faudra plusieurs jours pour arriver d'une part au constat que nous n'avons pas récupéré sur cette journée bordelaise et que, à respectivement trente-neuf ou trente-huit ans, notre corps nous demande aussi plus de temps qu'il y a quinze ou vingt ans pour se mettre en route et se réparer.

Notre nouvel objectif est Langon, en train. Karima préfèrerait rejoindre Bazas directement et la voie de Vézelay mais je ne suis pas sûr du tout qu'il y ait une possibilité de rallier Bazas en bus à ce moment-là. Ce que je sais, c'est qu'il n'y a ni train ni gare à Bazas et que Langon, sous-préfecture de Gironde, avec ses sept mille quatre cents habitants, peut nous proposer des hébergements. J'appelle donc l'office de tourisme local, qui est une bonne clé pour se dépanner lorsqu'on est "à l'arrache" et celui-ci me propose directement d'appeler le gérant du gîte "Les Châtaigniers". Je téléphone donc à Fabrice qui me dit qu'il y a bien de la place au gîte et qu'il est possible de réserver une nuit avec le petit-déjeuner pour deux personnes et pour 44 €. J'accepte immédiatement la proposition et me voilà un peu soulagé : nous avons marché un petit bout sur cette étape de Cadillac, et nous effectuerons aussi un plus grand bout sur l'étape de Bazas. L'heure et demie d'attente à la gare de Cadaujac est donc utile pour préparer la fin d'étape et aussi pour digérer la déception de devoir une nouvelle fois prendre un moyen de transport pour avancer. Je regarde le parcours de la gare au gîte et je vois qu'il nous faut encore marcher mais cette fois, la pente nous attendra à l'arrivée.

En train, cette fois, le trajet est plus long que celui qui nous avait conduits de Gauriac à Saint-André-de-Cubzac. Nous nous enfonçons dans le pays et nous nous rapprochons rapidement du Lot-et-Garonne, en remontant le fleuve. A l'arrivée à Langon, je me sens comme parachuté. Dans cette petite ville, nous nous orientons et remontons progressivement vers la vaste zone commerciale (je suis surpris de sa taille par rapport à celle de la ville). J'appelle Leclerc Sports pour savoir si Karima peut trouver des sandales de randonnée dans le magasin mais mon interlocutrice me répond par la négative. Que va nous apporter cette journée ? Nous décidons de renverser le cours plutôt négatif des choses et j'invite mon épouse à aller voir tout de même dans le magasin et finalement, elle peut y acheter ses fameuses sandales ! Le sourire revient de son côté. Il en faut peu. Mais ce chemin, ou plutôt ce périple, nous apprend qu'il faut s'en satisfaire à chaque instant que nous en avons l'occasion. J'appelle Marion, notre hôte du soir qui travaille avec Fabrice (il m'en avait informé auparavant par téléphone) pour qu'elle se rende sur place. Il nous faut alors franchir les derniers ronds-points et cette circulation permanente nous épuise nerveusement. J'ai hâte d'arriver au gîte (nous passons devant une dernière boulangerie qui pourra être utile le lendemain matin) et celui-ci vient à point nommé, aux toutes premières encablures de la forêt landaise.


Karima dans les hauteurs de Langon
9 octobre 2021

Malgré onze kilomètres de marche "seulement" (six le matin et cinq l'après-midi), tous les services sont à proximité et nous pourrons nous rendre au restaurant (Au Bureau) délestés du poids des sacs et en sandales. Au gîte, nous sommes accueillis rapidement mais avec courtoisie par Marion. Nous avons une partie de l'espace qui est à nous. Très vite, je comprends que les lieux datent, peut-être d'une quarantaine d'années même s'il y a quelques brochures et un bureau pour accueillir les clients de passage. Une partie nous est réservée, avec les sanitaires et la chambre et à peine la porte ouverte, nous sommes saisis par la forte humidité ambiante. C'est comme si les lieux n'avaient pas été occupés depuis longtemps. Pourtant, les locaux ne sont pas sales pour autant. Je rappelle Marion pour comprendre le fonctionnement de la chasse d'eau qui fonctionne comme le reste de la pièce à l'électricité (!) et après mon coup de fil, j'aperçois la petite affiche manuscrite qui explique la même chose ! Ah, les affiches... Après un repas correct, nous savons que nous allons bientôt de nouveau quitter la civilisation. Nous nous endormons avec l'idée de découvrir très vite la forêt landaise...



Profil de l'étape : De Villenave-d'Ornon à Cadaujac, le tracé suit la D 1113 sur une trajectoire sud / sud-est. Il n'y a rien de particulier sur cette route, qui quitte progressivement la ville au fur et à mesure que l'on progresse vers le sud. Les écarts de relief ne sont pas significatifs. De la gare de Langon au gîte Les Châtaigniers, il faut par contre monter le long de la N 124 sur quelques hectomètres, un effort assez brut qui fait mal aux jambes. La fin de cette portion d'étape n'est pas particulièrement difficile, hormis par la succession de ronds-points qui nécessite d'être très vigilant par rapport au trafic routier.





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